Malgré son statut de hub technologique mondial, la Chine peine encore à s’imposer sur le marché des puces électroniques. Elle ne fait toujours pas le poids face à Taïwan, au Japon, aux États-Unis et à l’Europe. C’est dans ce contexte qu’elle a créé en décembre 2021 la méga-entreprise China Rare Earth Group avec pour objectif principal de renforcer sa domination sur les terres rares. Celles-ci constituent les matériaux de base des produits électroniques.
La Chine ne produit que 16 % de ses puces
Si la Chine est un géant technologique avec notamment ses BATX (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi), elle a encore du mal à honorer son rang dans certains domaines, dont l’industrie des semi-conducteurs. Celle-ci est actuellement dominée par les Etats Unis, le Japon, la Corée du Sud, l’Europe et Taïwan. Ce dernier territoire fait figure de patrie pour les wafers grâce notamment à TSMC, leader dans la fabrication de puces électroniques. A ce jour, la Chine ne produit que 16 % des puces qu’elle consomme. Elle importe donc le gros de sa consommation. Une dépendance qui l’a mise dans une situation difficile après que les Etats Unis ont imposé des sanctions sur ses achats.
Depuis quelques années, Pékin tente de gagner son autonomie dans l’industrie électronique. Il a d’abord lancé en 2015 le plan Made in China 2025 qui vise la production de 70 % de sa consommation nationale annuelle de composants électroniques, contre 15 % actuellement. Le gouvernement a également inscrit les semi-conducteurs dans son 14e plan quinquennal au même horizon 2025. Il a en outre initié la construction de 28 nouvelles usines avec un financement de 26 milliards de dollars. Récemment, l’empire du milieu a jeté son dévolu sur les terres rares.
Une armée géopolitique nommée China Rare Earth Group
Les terres rares sont un ensemble de 17 métaux stratégiques pour des industries de pointe. Il s’agit précisement de 15 lanthanides complétés par le scandium et l’yttrium. Ces éléments entrent dans la fabrication de nombreux produits de haute technologie comme les armements, puces, écrans, voitures électriques, éoliennes et panneaux photovoltaïques. Depuis les années 1990, la Chine est le principal producteur de terres rares au monde. Elle pesait 60 % de la production mondiale en 2021, contre 90% au début des années 2000. En décembre 2021, elle a créé un géant minier pour consolider, voire renforcer sa domination sur le secteur. Ce conglomérat s’appelle China Rare Earth Group.
Née de la fusion des principaux exploitants chinois (Minmetals, Chinalco et Ganzhou Rare Earth), cette méga-entreprise doit rapidement faire monter le poids de la Chine à 70%. Au pays, elle représente 62% des terres rares lourdes et 30% des terres rares légères nationales. Avec 31% des parts, Pékin en est l’actionnaire majoritaire. Le gouvernement dispose ainsi de de toutes les manettes pour réglementer l’industrie nationale. Il souhaite, par exemple, stabiliser la production et revaloriser les prix. Mais par-dessus tout, l’Etat ambitionne secrètement d’utiliser son groupe comme une arme géopolitique pour contrer les sanctions américaines sur ses terres rares et ses importations de puces.
Produire 70 % des semi-conducteurs dès 2025
China Rare Earth Group doit en outre permettre à Pékin de peser dans les nouvelles négociations commerciales avec Washington (mais aussi Bruxelles). Ce possible diktat suscite d’ailleurs des inquiétudes chez les Américains et Européens, qui dépendent respectivement à 80 et 90% des approvisionnements chinois. Outre le joker, la Chine peut surtout espérer atteindre son objectif à court terme de produire 70 % des semi-conducteurs qu’elle consomme. Et cela dès 2025. Le pays a déjà vu sa production de terres rares augmenter ces derniers, tandis qu’elle rationne ses exportations. Cette politique devrait favoriser des investissements colossaux et permettre de maîtriser les technologies nécessaires à son industrie électronique.