C’est un parcours qui surprend… Et qu’elle assume pourtant sans sourciller. Scientifique reconnue, un temps responsable d’une ONG de sensibilisation sur le cancer, Moira Gilchrist a rejoint depuis plus de dix ans les rangs de Philip Morris International (PMI), le leader mondial de l’industrie du tabac. Un choix cohérent pour cette militante qui veut changer de l’intérieur le modèle des Big Tobacco pour en faire des champions du sevrage tabagique.
C’est dans un long entretien au journal écossais Scotsman, que la directrice de la communication publique et scientifique du groupe PMI, est revenue sur son parcours atypique. Un doctorat en pharmacie d’abord, un travail en laboratoire pour développer de nouveaux traitements anti-cancer, puis des postes à responsabilité dans l’ONG spécialisée Cancer Research UK. Comme elle le reconnait, « rien ne me prédisposait à rejoindre l’industrie du tabac ».
A part peut-être un concours de circonstance, un déménagement pour raisons personnelles en Suisse au début des années 2000, à l’époque où PMI décide de changer de modèle économique et de développer des substituts à la cigarette pour préparer l’après-tabac. Elle-même fumeuse désireuse d’arrêter, Moira Gilchrist est séduite par les potentialités en matière de santé publique offertes par de tels dispositifs. Elle rejoint PMI en 2007 au sein de l’équipe développant l’Iqos, l’appareil de tabac à chauffer de PMI.
Au fil des années, la scientifique a progressé dans la hiérarchie du cigarettier, mais a conservé la même ligne de conduite. Elle voit son travail actuel comme la continuité de ses expériences précédentes et elle souhaite proposer des produits moins nocifs pour accompagner les fumeurs dans leur sevrage tabagique. Elle assure d’ailleurs que sur les 11 millions d’utilisateurs de l’Iqos à travers le monde, 8 millions ont totalement arrêté la cigarette. « Et seulement en 4 ans », insiste-elle.
Moira Gilchrist n’est pas peu fière de la nouvelle campagne du groupe PMI, « Unsmoke your world », qui affirme publiquement pour la première fois l’ambition du groupe de sortir de la cigarette. « J’ai eu la chance d’amener ce projet à la vie et de changer totalement la trajectoire du futur de la société, et potentiellement de toute l’industrie », se félicite-elle. Pour elle, les substituts à la cigarette comme le tabac à chauffer sont « une nouvelle donne pour le milliard d’hommes et de femmes qui fument dans le monde ».
Et si Moira Gilchrist assume les critiques dont fait l’objet l’industrie du tabac, elle assure que « si nous continuons sur cette trajectoire d’être totalement transparent à propos des faits scientifiques que nous avons, de soutenir les régulations en place et de nous assurer que nous faisons notre maximum pour détourner les jeunes des produits tabagiques, alors le soutien global des professionnels de santé va s’améliorer avec le temps ».